Expertise

Guider les PME vers le succès sur le marché international

Interview du Pr. Ingo Stolz, spécialiste des compétences managériales à l’international

Pour les PME suisses, l'internationalisation est un levier important, voire une condition sine qua non pour se développer et assurer leur réussite sur le long terme. Cependant, l'internationalisation est un processus extrêmement complexe et risqué, et très exigeant pour l’entreprise et son management. C'est ce que montre l'étude de la Haute école spécialisée de Lucerne (Hochschule Luzern) «KMU zum internationalen Erfolg führen» (Guider les PME vers le succès sur le marché international). Quelles compétences les PME suisses doivent-elles développer pour réussir à l’international ? Réponse du Pr. Ingo Stolz.

Internationalisierungskompetenzen

Ingo Stolz, pouvez-vous nous expliquer ce qui conditionne le succès d’une PME sur le marché mondial?

Le processus d’internationalisation n’est pas le même que l’on soit une PME ou une grande entreprise. Ce qui marchera pour une grand entreprise ne marchera pas forcément pour une PME. 

L’expansion à l’international est du ressort de la direction. Dans une PME, il ne s’agit pas de prendre une décision stratégique ou de demander un avis d’expert, le facteur clé c’est l’investissement personnel du CEO. La question de l’internationalisation ne peut pas être déléguée.

Dans une PME, l’internationalisation n’est généralement pas un processus linéaire; c’est n’est pas non plus un processus stratégique: c’est un processus d’entreprise.

Qu’entendez-vous exactement par processus d’entreprise?

Le CEO doit «mettre les mains dans cambouis». Lorsqu’une PME se lance à l’international, elle ne sait pas toujours très bien où cela va la mener, ni quelles activités vont être impactées. C’est dans ce sens que je parle de processus d’entreprise. Par ailleurs, on commence généralement petit à l’international, c’est-à-dire en limitant les coûts et en ménageant ses ressources. On commence par activer son réseau. Par exemple, en se rendant à l’étranger et en prospectant le terrain avec un client local pour se faire une meilleure idée du terrain. C’est un bon moyen de s’informer et d’évaluer ses chances de réussite.

Il faut aborder l’international en tâtant le terrain, à petit pas, sans prendre de grands risques, pour tester ce qui marche.

Tâtonner, acquérir de l’expérience, développer son flair, se rendre régulièrement sur le terrain pour se faire une idée la plus complète possible du pays. Voilà les étapes qui aideront les PME à progresser dans leur internationalisation.

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Comme mentionné plus haut, tout dépend du plus haut responsable: est-il courageux? Aime-t-il – ou elle - vivre de nouvelles expériences? En définitive, il faut du courage pour dire: «Je vais le faire maintenant et trouver les ressources nécessaires». Pour les PME, c'est une décision très courageuse, car leurs ressources sont limitées. C'est souvent à un stade précoce, où l’on manque de courage et de détermination, que les tentatives d'internationalisation échouent.

A l'heure de la mondialisation et de la numérisation, les PME doivent-elle adopter une approche différente de l'internationalisation?

Le processus de base reste sensiblement le même: il faut se lancer, tester et mettre en pratique ce qu’on a appris, puis développer le projet.

L’échelle de temps est toute différente aujourd’hui et les opportunités sont démultipliées.

Je pense qu’on a plus autant de temps qu’avant à investir dans le processus. D’un autre côté, il y a plus d’opportunités: il y a de chances que mon client soit déjà actif à l’étranger ou qu’un de mes collègues ait déjà pas mal d’expérience du marché visé. Enfin, il est beaucoup plus facile aujourd’hui pour une PME d’accéder rapidement aux connaissances et ressources nécessaires. Des organismes de soutien comme Switzerland Global Enterprise (S-GE) apportent aussi une aide décisive.

Dans votre étude, vous avez examiné les compétences pertinentes en leadership et en gestion. Quelles sont-elles?

Notre enquête a révélé que les PME doivent réunir des compétences dans différents domaines, à savoir:

  • conscience des risques
  • stratégie
  • organisation apprenante
  • esprit d’entreprise
  • compétences interculturelles
  • partenariats internationaux
  • orientation marché.

Il convient de développer suffisamment de compétences dans ces différents domaines. La mauvaise nouvelle c’est qu’il faut tout maîtriser. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’est pas nécessaire de tout maîtriser dès le départ. On peut acquérir ces compétences au fur et à mesure que le projet d’internationalisation progresse. Et on peut se faire aider. L’étude donne des indices pour savoir dans quels domaines développer des compétences, sur quels comportements travailler et quelles bonnes pratiques adopter dans l’entreprise.

Pour un dirigeant de PME dont le temps et les ressources financières sont comptés, comment acquérir les compétences nécessaires?

Il doit garder le lead surtout dans la phase initiale, ne pas déléguer ces compétences, pour se faire sa propre idée du marché. Lorsqu’on se rend sur le marché-cible, on peut se familiariser avec les questions interculturelles et commencer à bâtir des coopérations. Si l’activité internationale progresse, on pourra développer des compétences plus spécialisées que l’on pourra alors déléguer, par exemple à un distributeur.

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Il ressort de votre étude que le management est tiraillé en permanence entre la nécessité d’agir de façon intuitive et de prendre des décisions rationnelles. Dans quelles situations faut-il être particulièrement intuitif?

C’est surtout au début du processus qu’il faut suivre son intuition. La situation est souvent si complexe qu'elle ne peut être appréhendée rationnellement: comment fonctionne le marché? Quelles sont les règles à respecter? Les grandes entreprises mobilisent beaucoup de ressources pour saisir ces enjeux. Cela n'est pas possible pour les PME, et une action intuitive est souvent nécessaire. Pour suivre son intuition en toute confiance, il faut vivre la situation de visu, en se rendant sur place pour rassembler des expériences et affiner ses intuitions.

À propos de l’étude «KMU zum internationalen Erfolg führen»

L’étude a été conduite par la Hochschule Luzern sous la direction du Pr Ingo Stolz et de Sylvie Scherrer. L’étude examine le rôle du management dans les PME suisses dans le contexte de l’internationalisation. En savoir plus ici.

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